lundi 31 décembre 2012

Tombouctou: Iyad tourne t-il le dos à la ville des 333 Saints


De notre confrère Adama Diarra

Des témoins ont vu « Abu Fadil » de son vrai nom Iyad Ag Ghaly quitter sa résidence de Tombouctou après environ deux mois de séjour, auprès de son mentor algérien Abou Zeid. On ignore les raisons de son départ et sa destination pour l’instant. Iyad était parti de Kidal après l’explosion d’une grenade qui avait fait un mort et deux blessés dans sa résidence. La somptueuse villa du défunt Kadhafi est devenue l’hôtel préféré d’Abou Zeid et de Iyad. Lors des premières missions humanitaires à Tombouctou, Abou Zeid y a offert un dîner copieux à ses « hôtes » dans une grande ambiance. L’homme, sa famille et ses proches collaborateurs y sont installés comme les vrais propriétaires des lieux.


Le chef d’Aqmi sort de l’ombre


Depuis des décennies, Abou Zeid, l’homme dont on entendait que le nom est sorti de l’ombre pour accuser les autorités françaises à travers une vidéo envoyée à la rédaction de Saharamedia (journal en ligne mauritanien). Cet homme fluet et de petite taille a annoncé dans l’enregistrement vidéo de quatre minutes que « les otages sont jusqu'à présent vivants », avant d’assurer que « l’arrêt des négociations et leur blocage total relèvent de la responsabilité de la France. Quant à nous, nous sommes pour les négociations et nous l’avons dit aux Français voici un an déjà ».

Le preneur d’otage conclut : “la France n’a pas daigné répondre jusqu'à présent à notre offre de dialogue ». Mais derrière cette sortie médiatique se cache un véritable embargo sur l’une des plus importantes sources de financement de d’AQMI : le refus de paiement de rançon par les nouvelles autorités françaises. L’argent offert par les pays occidentaux pour libérer leurs citoyens sert, on le sait, à renforcer le réseau d’AQMI et de ses démembrements (Ansardine, MUJAO). Pour la libération des huit otages français détenus dans le Sahara, les détenteurs exigent le paiement de plus de cent millions d’euros. Depuis l’occupation des régions du Nord, les groupes islamistes ont recruté des centaines de mercenaires venant de toute la sous-région et des pays maghrébins et leur prise en charge demande beaucoup d’argent.

Tombouctou : l’état de santé de la population se dégrade


De notre confrère Adama Diarra

Ansardine, le groupe islamiste qui contrôle la ville de Tombouctou sous couvert d’AQMI a du mal à gérer les centres de santé de la région qui débordent de malades, en majorité des paludéens. Dans une conversation téléphonique avec le porte-parole du mouvement, Sanda ould Bounama, ne cachait plus son inquiétude vis-à-vis de la situation sanitaire de la région.

Fidèle à sa logique, il relève que « les populations souffrent pendant que le monde entier ne voit que la destruction des mausolées qui ne sont que des futilités ». Comme si cela ne suffisait pas, il va jusqu’à accuser l’Etat malien de crime contre l’humanité: « L’Etat ne fait rien pour encourager les médecins à rester dans les centres de santé. Il y a rupture de stock de médicaments ». La cruauté des islamistes au nom de la charia fait fuir le personnel soignant vers d’autres cieux plus cléments. 


Pour le coordinateur de l’hôpital de Tombouctou, Ansardine devrait plutôt s’occuper de la santé des populations au lieu de parler d’application de la charia. « Il faudrait que les gens soient en bonne santé avant de leur imposer quoi que ce soit. 85% des structures de santé de la région ne fonctionnent plus ou presque. La situation est encore plus alarmante à Diré et Tombouctou où il y a des malades couchés à même le sol. Il faut agir et vite ».

Nord-Mali: Quand la vie humaine ne contente plus les islamistes...

Ecrit par Adama Diarra

Les responsables d’Ansardine ont donné l’ordre à leurs éléments de tirer à vue sur tous les chiens. Les propriétaires de ces animaux assistent impuissants à cette tuerie organisée à laquelle les hommes armés se donnent à coeur joie. Il est interdit aux hommes de porter des pantalons qui descendent sous la cheville.
Les récalcitrants sont envoyés en prison. Deux filles et trois garçons ont été arrêtés et jetés en prison, parce qu’ils se promenaient dans la rue après 21 heures. » Le port des ornements, même sous le voile est interdit aux femmes. Idem pour les gris-gris. Ils ont déjà une baignoire remplie de gris-gris au poste de contrôle ». Ils ont aussi demandé aux habitants de créer un nouveau marché où les hommes et les femmes seront à part.
La majorité des éléments d’Ansardine sont, selon notre interlocuteur, d’anciens éléments du MNLA qui ont rejoint le mouvement sous peine de finir comme leurs compagnons de Gao, Ménaka et d’Ansongo.


Gao : Les règles de la charia se durcissent.

Ecrit par Adama Diarra

Des éléments du MUJAO ont arrêté deux apprentis de la compagnie de voyage « Bani transport » à l’entrée de la ville de Gao, il y a quelques jours. Ils sont accusés de transporter du « vin rouge » dans deux bidons de 20 litres.

Malgré les interrogatoires, on n’a pu mettre la main sur le propriétaire des deux bidons de vin. C’est alors que les éléments du MUJAO au poste de contrôle ont arrêté et jeté en prison les deux apprentis. Selon les rumeurs, la commande de vin rouge aurait été faite par une femme burkinabé installée à Gao. 



Photo prise par Adama Diarra le 07 septembre 2012 à Gao
Cette dernière, interpellée par la brigade des mœurs du groupe islamistes, a nié les accusations et a pu retourner sans encombres chez elle. Les deux apprentis ont été jugés le lundi 24 décembre par les juges salafistes égyptiens. Verdict : dix coups de fouet.
Toujours à Gao, six jeunes de la ville qui se rendaient à un mariage ont été interceptés par des éléments du MUJAO. Ils sont accusés de transporter des produits stupéfiants sur eux. Sentence : soixante dix coups de fouet, chacun, sur la place publique. Après ce supplice les accusés ont été condamnés à un mois de prison ferme.
Les « procès » se tiennent tous les lundi et jeudi et l’application de la sentence est immédiate. C’est la mairie de Gao qui fait désormais office de palais de justice des islamistes. Il est ouvert au grand public, sous la surveillance d’hommes armés pour parer à tout mouvement de contestation. Les jugements ne durent que deux ou trois minutes, à peine le temps de lire les chefs d’accusation, suivi de la décision du juge avec le concours d’un interprète (arabe-sonrhaï). Au cours des jugements, c’est la parole de l’accusé contre la bonne ou la mauvaise humeur du « kadi » (juge.)

La ville de Gao est plongée dans le noir depuis le vendredi 21 décembre dernier. « Le piston du gros groupe électrogène a pété dans la soirée. Depuis, c’est l’obscurité totale à Gao. Certains nantis se débrouillent avec les panneaux solaires tandis que d’autres utilisent de petits groupes électrogènes », explique un habitant de la ville. Nos contacts indiquent que les techniciens ont pu « dépanner le moteur, mais, il y a problème d’huile de moteur qui doit venir de Bamako ». La crainte chez les Gaois c’est de passer la fin de l’année 2012 dans le noir. La centrale d’énergie est sous contrôle des islamistes du MUJAO et le carburant financé par le CICR.

A Ansongo, un communiqué diffusé à la radio locale interdit désormais aux hommes de raser leur barbe.