vendredi 7 décembre 2012

Crise malienne : Demain la guerre. Dialoguer avec qui et sur quoi ?

Des atrocités ont été commises contre les populations maliennes non armées, dans leur propre pays,  sans que la moindre condamnation soit exprimée par la communauté internationale  et les nombreuses organisations de défense des droits de l’homme. Celles-ci disposent pourtant les capacités nécessaires et les instruments efficaces pour exprimer d’ors et déjà des sanctions contre ceux les auteurs des crimes commis contre les populations vulnérables et contre le patrimoine culturel dans le Nord du Mali. Et ces atrocités méritent d'être considérées par les acteurs qui ouvrent pour le respect des droits et libertés, comme des crimes contre l’humanité pour la seule raison qu’ aucune nation au monde accepterait que son peuple subisse ce genre d’oppressions et d’esclavage sur son territoire et qu’elles puissent demeurer impunies.


La part du Mali

Il serait plus juste et plus équitable que les maliens qui ont porté une atteinte à la cohésion, la paix, la dignité nationale, aux acquis démocratiques et favorisé l’insécurité et la haine soient traduits devant la justice. Mais cette question ne saurait concerner que les groupes armés dans le Nord du pays. Il y a également dans le Sud, des individus qui ont violé les lois de la République et porter des atteintes graves aux droits et libertés dans le pays. Cependant, si nous voulons trouver une solution à cette crise, l’Etat se veut être non seulement irréprochable et ferme dans ses actions, mais aussi prendre le temps d’écouter toutes les préoccupations de part et d’autre pour accorder  une chance au dialogue et à la réconciliation. 
Et afin que nous puissions réussir dans l’instauration de la paix, la cohésion sociale et l’unité nationale, il sera utile qu’il y ait des discutions entre maliens.  Cependant, le plus important n’est pas la discussion en soi, mais plutôt l’objet de la discussion. Aussi, il serait plus approprié de parler, non pas de négociations entre l’Etat malien et les groupes armés, à savoir le MNLA et Ansar Dine, mais plus tôt de dialogue. Puisque la République du Mali  a claironné en toute évidence de demeurer intraitable à toute tentative d’atteinte à son intégrité territoriale et au caractère laïc de sa République.

En revanche, dans les pourparlers en vue de la gestion de la crise, l’Etat malien doit veiller à ce que les intérêts de toutes les ethnies et de tous les groupes religieux soient pris en considération. Les préoccupations tous méritent d’être entendues, pas seulement que celles des touaregs et des musulmans. Aucun malien ne doit être exclu, parce que la responsabilité de l’Etat, c’est de respecter et de faire respecter le droit de chaque citoyen y compris celui des minorités, qu’elles soient ethniques ou religieuses.

A cet effet, le respect des droits et libertés, l’implication de chaque citoyen dans le processus de paix, ainsi que la promotion des différentes cultures et ethnies du pays peuvent s’avérer incontestablement l’instrument efficace pour une paix durable et un gage de développement économique et social.


Dialoguer, avec qui et sur quoi?

L'opinion malienne est partagée quand à l’idée de mener des négociations avec des groupes armés dans le Nord du pays. Si une partie des ces groupes est issue de nationalités étrangères, l’autre partie qui regroupe le MNLA et Ansar Dine est constitué de citoyens maliens issus de la culture touareg.  Mais il convient de noter que ces deux groupes ont des objectifs différents et donc des revendications diverses. Si d’une part le MNLA réclame l’indépendance du Nord du Mali, Ansar Dine, quant à lui, œuvre pour l’application de la charia dans tout le Mali. Mais compte tenu de la détermination de la communauté internationale à épauler  le Mali à recouvrer l’intégrité de ses territoires et préserver sa laïcité, ces deux groupes ont pris la mesure d’adoucir leurs discours.  

Le MNLA, loin de son projet indépendantiste a promis de se contenter d'un "droit à l'autodétermination", dans le cadre de la médiation de Blaise Compaoré. Mais les réalités sur le terrain laissent penser  que ce renoncement  est loin de faire l'unanimité au sein du groupe. Car, au moment où se profile à l’horizon des discussions avec les autorités maliennes, le MNLA a pris récemment quelques initiatives militaires isolées pour tenter de chasser ses anciens alliés, à savoir les terroristes du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) qui a aussi été l’un des groupes ayant participé aux atrocités commises contre l'armée malienne, en janvier dernier dans les villes d’Haguel hoc et de Tessalite. Ces initiatives MNLA, loin d’offrir une solution optimale, a affaiblit davantage le mouvement qui a définitivement perdu les quelques positions qui lui restaient au Nord et enregistré des pertes humaines très conséquentes et avoisinant une centaine de combattants.

Et comment peut-on croire en la sincérité du discours du MNLA, si ses membres, au lieu de parler des maliens, de façon générale, s’autorisent à considérer les populations maliennes du Nord, comme « le peuple de l’azawad ». Ce qui est exaspérant et qui agace encore davantage,  c’est que « Azawad »  reste un mot dépourvu de toute signification et qui demeure chimérique dans l’esprit de ceux qui lui ont donné naissance.

Compte tenu de l’anéantissement de ce mouvement par ses alliés d’hier, devenus des ennemis d’aujourd’hui, les maliens, dans leur grande majorité sont frileux et questionnent cependant la nécessité du dialogue avec ce mouvement. Et leurs inquiétudes sont d’autant plus grandes que les accords issus des négociations passées avec les différentes rebellions ont montré leurs faiblesses, leurs ambiguïtés et leurs brièvetés.

Partant de ce constat, plusieurs  analystes ainsi que la grande majorité des maliens mettent en garde les autorités maliennes contre toutes négociations qui aboutiraient à brader l’intérêt général de la nation malienne, ainsi que la dignité du peuple du Mali au détriment d’une poignée d’individus, très peu représentatifs des populations du Nord qui, de surcroît ont combattu pour régime de Kadhafi et qui n’ont eu aucune difficulté à retourner leurs armes contre leurs frères et sœurs du pays. Cependant, c’est au regard de l’ensemble de tous ces facteurs réels,  que l’inquiétude et la frilosité des populations maliennes trouvent leur sens et leur légitimé.

Au delà du respect de la République laïque et de l’intégrité territoriale du Mali, que pourraient revendiquer les groupes armés MNLA et Ansar Dine ?

Le groupe islamiste Ansar Dine, dirigé par Iyad Ag Ghali, un ancien membre du MNLA et qui n’avait  obtenu ni valeur, ni position importante au sein de ce groupe a eu la sottise de s’allier à Aqmi pour se renforcer en termes d’image et de capacités matérielle. C’est ce groupe, en accord avec d’autres groupes terroristes qui s’est autorisé à amputer des bras, à fouetter publiquement et à lapider des citoyens maliens au vu et au su du monde entier. Et pour redorer son blason, Ansar Dine s’est engagé à respecter  strictement les droits fondamentaux des populations lors des pourparlers avec le médiateur de la CEDAO. De quels droits s’agira t-il ?  

Par ailleurs, aucune raison ne justifiera le dialogue avec les groupes armés étrangers, qui sont venus s’installer sur les territoires maliens, sans aucun accord légal de l’Etat et qui se sont permis de porter des atteintes graves à la dignité de toute la nation et à détruire ce qu’elle a de précieux et d’irremplaçable, son patrimoine. Donc, ceux-ci doivent être combattus avec toutes les énergies possibles, au nom de la légitime défense, la lutte contre le terrorisme et le respect des droits de l’homme. Mais pour l’heure, ces raisons ne semblent pas contenter les occidentaux et l’agenda de ceux-ci semble l’orienter vers d’autres objectifs. Il faut reconnaître que ces derniers ne paraissent pas pressés de  délivrer le Mali du joug des terroristes et des narcotrafiquants, étant donné que les enjeux, particulièrement économiques et géopolitiques  restent très minces. Et pour cause : le Mali, contrairement à la Libye et l’Iraq, ne possède pas de puits pétroliers qui pourraient menacer l’approvisionnement des grandes puissances occidentales. On se rappelle que dans ces deux pays, qu'aucune chance n’avait été accordée au dialogue. Les puissances occidentales  se sont précipitées de mener la guerre dans ces pays respectifs. 

Ces mêmes intentions peuvent être constatées dans la crise syrienne. La Syrie reste en toute évidence la grande priorité des puissances occidentales. Et on verra dans les semaines à venir de quelle manière certains pays occidentaux vont trouver des moyens pour approvisionner l’opposition syrienne, déjà reconnue comme pouvoir légitime en armes de combat,  au nom du respect de droits de l’homme et de la démocratie. Tandis qu'au même moment, les autorités maliennes peinent à subvenir aux besoin des populations marginalisées, les plus vulnérables et à assurer aux enfants une éducation, un droit à priori garanti en tant normal et ôté du fait de l’occupation islamiste et terroriste.

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